RWB Reims
Je ne pouvais pas trouver la voiture de sport de mes rêves, alors je l’ai construit moi-même.
Ferdinand Porsche
Salut Mathieu, alors où sommes-nous ici ?
Bienvenu chez Easy Cars, à Reims. Je suis le copropriétaire de la société avec Hervé. Easy Cars est une société d’achat et de vente, de dépôt-vente, d’entretien mécanique, carrosserie et préparation de véhicules. Nous sommes plutôt spécialisés Porsche – par passion, mais nous nous occupons aussi de tous les véhicules de sport et/ou de prestige.
Comme tu nous l’expliquais, tu as commencé ici avec trois fois rien : le budget d’une A4.
Je suis « Porschiste ». Mais j’ai un autre problème, je suis passionné. Je voulais toutes les voitures. Cependant, pour toutes les avoir, il fallait toutes les acheter. Un des meilleurs moyens que j’ai trouvés est de les acheter pour les revendre. On a commencé il y a quelques années, à en vendre une, deux et la société s’est montée d’elle-même. Tout s’est enchainé jusqu’au moment où il nous a fallu un garage plus spacieux dans lequel nous pouvions mettre environ huit voitures. Puis un second dans lequel nous pouvions intégrer quarante voitures - pour aujourd’hui encore manquer de place.
Naturellement, on s’est également tourné vers l’entretien mécanique puisqu’il est relativement couteux d’entretenir une quarantaine de voitures avant de les vendre. La demande de notre clientèle a également été un moteur dans le développement de cette branche puisque les spécialistes de cette branche - qui peuvent faire des choses sympas, sont très peu nombreux en France.
C’est ensuite par le biais de notre mécanicien qui nous a dit :
- Si nous faisions un peu plus que simplement entretenir les voitures ?
- Mais genre quoi ?
- Ben Singer, ou RWB !
- Ouah ! RWB, c’est carrément canon, je suis fan des vidéos, on peut tenter un truc !
Alors, comment ça se passe ?
Nous sommes allés voir la préparation d’une voiture - un peu comme vous là. Ensuite, nous avons pris contact avec le propriétaire de la voiture parce que les gens ne peuvent pas rentrer dans la famille RWB juste comme ça. Il nous a trouvé sérieux et sympathiques et nous a amenés à la rencontre d’Akira Nakai (Ndr – Plus connu sous le nom honorifique de Nakai-san) afin de voir s’il accepterait de travailler avec nous ou pas.
Nous nous sommes rencontrés deux, trois puis quatre fois. Nous sommes ensuite allés chez lui. Finalement il nous a demandé comment nous envisagions la voiture.
Pour la première voiture, nous lui avons donné les caractéristiques que nous voulions. Nous ne savions pas quelle couleur choisir, alors c’est lui qui a fait ce choix parmi les trois que nous lui avions proposé.
RWB, ça fonctionne comme une famille ?
Exactement. C’est ce que j’expliquais. On ne rentre pas dans une famille si simplement. Pour notre part, nous sommes passés par le propriétaire de RWB en Angleterre (HIBIKI) qui est là aujourd’hui. C’est lui qui a glissé un mot pour nous à RWB au Japon. Sympathiser n’est pas forcément simple avec la barrière de la langue, mais il a vu que nous étions passionnés, que nous voulions les voitures pour rouler avec. C’est d’ailleurs le cas de notre numéro une qui a fait pas mal de kilomètres durant sa première année sur route et sur circuit. L’esprit RWB c’est exactement ça : avoir sa voiture et en profiter sur la route. C’est en tout cas cet esprit que veut inculquer le père de famille à ses enfants.
On partage énormément de choses. Il y a d’ailleurs une légende qui dit que la voiture qu’il a préparée est à lui. Quand il voyage, il faut que la voiture soit à sa disposition. Par exemple, s’il venait en vacances en France, j’aurais un appel me demandant de lui prêter.
D’où l’avantage d’en avoir deux. On connait un peu le principe de la mise à disposition chez nous aussi !
Après très honnêtement, il n’a pas vraiment le temps de prendre des vacances. Cette semaine, il est venu se poser deux jours sur Paris – avant de monter le kit chez nous. Il ne prend pas de voiture, quoi. Et inversement, quand nous allons visiter chez lui, il nous propose ses voitures sans aucun souci.
Chaque année, il nous invite aux 12 heures d’Idlers (Circuit Twin Ring Motegi – Japon) et nous propose de courir ou de faire juste un relai avec les voitures disponibles : « Partagez-vous la voiture. Vous faites ce que vous voulez. »
Comment en es-tu arrivé là ?
Depuis tout petit, je suis tombé amoureux de la 930 Turbo qui est la voiture la plus mythique chez Porsche - à mon avis, avec la 2.7 RS. Je suis né dans les années 80. Forcément, c’est la voiture que tu voyais partout avec le gros aileron derrière, celle que tu avais en petite Majorette.
Un de mes amis s’est acheté un Boxster neuf quand le modèle est sorti à la fin des années 90. Il me l’a fait découvrir et je l’ai trouvé extraordinaire. Je m’en suis donc acheté un dès que j’ai pu. Puis tout s’est enchainé. J’ai fini par acheter une 911.
J’ai toutefois fait une infidélité en m’achetant une Ferrari. C’est sympathique, mais ça ne m’a pas plu davantage, car ce n’est pas ce que je recherchais. Le bruit est agréable, le tout est mythique, car estampillé Ferrari. Néanmoins, on n’a ni l’agrément de conduite, ni le confort, ni la passion que l’on peut retrouver chez Porsche.
Les propriétaires de Ferrari sont généralement prétentieux. Chez Porsche, on voit toujours du monde comme des clients ou des amis, ici, qui vont passer les deux jours à discuter avec nous. On se rassemble tous régulièrement, un peu comme vous ou les clubs de Harley. On ne se prend pas la tête. On est tous au même niveau. Ce n’est pas une course à qui aura la plus belle, mais des échanges entre passionnés.
Et côté études, étais-tu destiné à ouvrir un garage de ce type ?
Pas du tout. Je n’ai pas fait de grandes études. J’ai débuté dans le milieu de la nuit et de la communication. J’étais DJ et animateur radio durant quelques années. J’ai bien gagné ma vie et j’ai pu me payer une Porsche. Ensuite, j’ai dirigé une radio. C’est dans tout ça que j’ai trouvé ma passion.
Et Hervé, mon associé, ne vient pas du tout non plus du milieu de l’automobile. On est tombé dedans. Enfin, on va plutôt dire que je l’ai entrainé avec moi. On ne se connaissait pas vraiment et il s’est passionné très rapidement quand je l’ai emmené avec moi, en fait.
Avec Porsche, même si on a l’impression de les connaitre par cœur, on en apprend encore tous les jours comme des petits détails qu’on ne connaissait même pas. C’est passionnant ! Des histoires captivantes et des anecdotes intéressantes, il y en a toujours à raconter sur une Porsche !
Comment en arrives-tu à te dire, ma RWB je la veux comme ça ?
Je suis quelqu’un qui observe beaucoup les choses et qui retient tous les petits détails que je capte à droite, à gauche. C’est exactement pareil sur les Porsche. Quand on voit la seconde, c’est typiquement ça. On remarque une série de clins d’œil à l’univers Porsche.
Sur la première, le bleu réfère à la couleur mythique de chez Porsche. Elle n’a pas duré longtemps, mais reste légendaire grâce à la 964RS ou à la 968 ClubSport. C’est aussi le bleu de l’Audi RS2 qui était préparée par Porsche. Et Nakai-san l’a sélectionné en rappel aux couleurs des écuries françaises bien que je lui aie proposé pour le côté historique de cette couleur chez Porsche. Au niveau de l’intérieur ou des centres de jantes, on peut s’attarder sur plein de petits détails qui sont tous des rappels à la marque.
Sur la nouvelle, le travail est encore plus approfondi. On a vraiment voulu faire un modèle pour célébrer les 70 ans de Porsche et les 55 ans de la 911. Cette semaine, on fête également les 60 ans de la 964. J’insiste là-dessus, car personne n’en parle. C’est ma voiture préférée, donc c’est un détail important.
C’est aussi les 20 ans de RWB. À cette occasion, on a voulu faire un modèle anniversaire parce que ça ne s’est jamais fait sur les 500 (environ) voitures produites. La signature d’Akira Nakai sur les appuis-têtes est un clin d’œil aux séries anniversaires de chez Porsche où on retrouvait la signature de Ferdinand Porsche dans les appuis- têtes.
On voulait également les jantes dessinées par Magnus, qui rappellent vraiment le design des Fuchs mythiques de chez Porsche, et le tissu Pepita Pied de Poule qui est, lui aussi, mythique.
C’est la voiture pour les passionnés, faite par un passionné, avec plein de clins d’œil pour les gens qui connaissent les véhicules !
Exactement ! C’est comme les films. Pour certains, tu les visionnes dix fois avant de voir tous les détails. Et encore, dix fois ce n’est parfois pas assez.
J’avais une dernière question parce que moi je suis très centré sur le clan. Quand nous nous sommes présentés à toi, ma femme t’a dit « Nous sommes les Barjozoku. Nous sommes un groupe… » et tu l’as coupée en disant « Ouais, ouais, on connait ! ». Et donc, tu nous connais comment ?
L’année dernière, vous vous êtes pointés au circuit de Gueux en même temps que nous. Je ne sais pas si c’était le pur hasard et tu m’as affirmé tout à l’heure que si. C’était chouette. En même temps, j’ai trouvé ça génial. Je me suis dit « C’est quoi ces gars qui arrivent avec des voitures toutes déglinguées pour certaines ». Et vous avez fait signer vos voitures. J’ai pensé : « Putain ! Les mecs ils font signer leur bagnole ! C’est fait. C’est terminé. Toi, tu vois les volants, c’est amovible, mais les bagnoles quoi ! »
Je me suis également dit : « Putain ! Les mecs sont dans leur délire. Ce n’est pas forcément le mien, mais on voit la passion ! » Je conçois tout à fait que tout le monde ne puisse pas rouler en Porsche ou voiture de prestige. Mais à partir du moment où la passion est présente, les gens se rassemblent toujours pour partager des choses ! Le plus important c’est que tu arrives à apporter une touche de toi : un sourire à quelqu’un, par exemple. C’est le plus beau dans la passion.
Je discutais avec un de vous hier, qui préparez des caisses. Il a l’air d’être un petit génie du truc. Ce mec-là, il est animé par la passion et ça se sent ! Je pense qu’il est comme Nakai-san. Au Japon, Akira Nakai a un associé qui est le financier du truc et Nakai-san, lui, c’est le génie. Demain, votre gars se trouve un financier, qui s’est développé par les réseaux sociaux et il aura de l’or dans les mains.
Je disais que je venais du monde de la nuit. J’ai fait ça pendant des années et mon kiff n’était pas de faire passer des musiques que j’aimais. Au contraire, je passais parfois des morceaux que je n’aimais pas du tout, mais je levais les yeux et je voyais toujours le monde s’amuser et sourire.
Et bien c’est exactement la même chose que je veux apporter dans les Porsche et c’est aussi ce que j’apprécie dans les groupes comme vous.
C’est ce dont je parlais quand je disais les mecs en Ferrari, c’est purement une question d’argent. Ils achètent leur véhicule et ils achètent aussi les gens. Je le constate quand je vais sur circuit. Les mecs arrivent pour faire un trackday. Ils prennent un mécano. Ils ouvrent à peine la fenêtre : « Pression des pneus. » et ils repartent, sans un merci, sans rien. Nous, chez Porsche, ça se passe complètement autrement ! Tu peux aller bouffer une pizza sur un coin de table, tu n’en as rien à branler ! Je le vois même ici, j’ai un client garé devant, avec une Porsche à 200 000€. Et bien il s’en fout !
C’est en partie à cause de cette mentalité qu’on vend moins de Ferrari, car ce n’est ni l’esprit, ni la clientèle que l’on souhaite avoir. Aujourd’hui, nous avons mis des jeans corrects, mais nous accueillons souvent les clients avec des jeans déchirés. Nous sommes chez nous, quoi ! Finalement nous recherchons un peu l’esprit industriel et man cave. Nous souhaitons que les gens se sentent comme à la maison quand ils arrivent ici parce que nous préférons travailler de cette manière. Nous travaillons un peu à l’américaine. Je pourrais même venir bosser en tongs, si l’envie m’en prenait.
C’est ça l’avenir. Et si demain, je devais faire un boulot qui ne me plaisait pas et bien j’arrêterais de travailler. J’ai toujours travaillé uniquement par passion. Aujourd’hui, j’ai un garage qui marche. J’arrive à gagner ma vie, tant mieux c’est cool, mais ce n’est pas une fin en soi. Si demain tout venait à se casser la gueule, je continuerais à faire ce que j’aime ; à préparer des voitures dans la mesure de mes moyens et je continuerais à amener des sourires là où je vais. On a qu’une seule vie. J’ai juste envie d’en profiter à fond sans me prendre la tête. Je n’ai pas envie de voir des cons toute la journée en faisant un job qui ne me plaît pas.
Par exemple, je ne saurais pas vendre des Clio (bien que, parfois, tu aies plus de marge sur une Clio que sur une Porsche) et vendre des voitures à des gars dans des costards à plusieurs milliers d’euros. Ce n’est pas mon délire non plus.
J’ai énormément de projets et si j’avais un budget illimité, je ferais travailler tout le monde. J’ai vu une S14 avec un kit Pandem. Juste pour la beauté du kit, même si je perds de l’argent dessus et bien j’en veux une. Un de mes prochains délires serait de me préparer un classe G. Je veux vivre par passion, sans me prendre la tête !
Crédits photos :
Rafa-Hell Photography
BarjoPanda Photographie
Adrien C.
Crédit vidéo :
Riz Tay